Covid-19 : la mobilisation continue



En soutien des soignants et des acteurs de santé, la lutte contre l’épidémie de Covid-19 se joue aussi dans les Agences régionales de santé. A l’ARS Hauts-de-France, cette mobilisation est totale depuis 18 mois.

Après une année 2020 dédiée à organiser la réponse du système de santé pour faire face à plus grande crise sanitaire du 21ème siècle et protéger la santé des habitants de la région - le récit est à (re)découvrir ici - l’année 2021 s’est trouvée augmentée par un défi vaccinal inédit, condition sine qua none d’une maitrise de l’épidémie et d’un retour à la vie normale.

Organisation de la campagne vaccinale, coordination du système de santé et des soins critiques,  gestion du contact tracing, déploiement dans les territoires d’une politique massive de dépistage et de prévention…

Au travers d’une série d’entretiens vidéo, les équipes de l’ARS Hauts-de-France reviennent sur les temps forts et coulisses de cette gestion de crise, placée sous le signe d’une adaptation et d’un engagement permanents.

Le défi vaccinal

28 décembre 2020, Loos, dans le Nord. Janine Vielledent, 98 ans (et demi), résidente de l’EHPAD Les Magnolias, vient de recevoir sa première dose de vaccin. Elle est l’une des premières personnes vaccinées de France, à l’occasion d’une opération pilote menée par l’ARS Hauts-de-France dans trois EHPAD de la région. « Je l’ai fait pour ma famille et  pour les gens d’ici » résume cette femme de caractère.

Depuis plusieurs semaines déjà, l’Agence et les acteurs de la région se préparent à relever l’un des plus grands défis de santé publique de notre histoire récente : vacciner, à partir de vaccins nouveaux et de circuits de distribution ad hoc, plusieurs millions d’habitants de la région en quelques mois. A commencer, en cohérence avec la stratégie nationale, par les populations les plus âgées, fragiles et exposées au virus.

Début décembre, 7 hôpitaux de la région ont été désignés comme lieux de stockage et points de départ des livraisons de vaccins, dotés de congélateurs leur permettant de conserver à -80° plusieurs centaines de milliers de doses. Prérequis techniques, logistiques, RH, protocoles sanitaires, conditions d’acheminement, chaine de conservation…. Tous les paramètres nécessaires au bon déroulement des opérations sont passés au crible par les équipes de l’Agence et les acteurs de la vaccination.

La priorité est donnée à ceux qui en ont le plus besoin, en premier lieu les 48 000 résidents des EHPAD de la région et des autres structures collectives d’accueil de personnes âgées, durement frappés par les deux premières vagues épidémiques.

« C’était un travail de dentelle. On a travaillé EHPAD par EHPAD, résident par résident"
Sylviane Strynckx, directrice de la prévention et de la promotion de la santé

Rapidement, le travail de dentelle laisse place au tissage d’un maillage dense de centres de vaccination avec les préfectures  – 63 fin janvier, 95 courant février – et à l’accroissement du nombre de personnes âgées et de professionnels vaccinés – 128 169 injections en janvier, 225 149 en février -.

Une montée en charge confirmée avec l'arrivée de la vaccination en ville fin février, chez des médecins libéraux bientôt rejoints par les pharmaciens, puis par les infirmiers et les sages-femmes, tous mobilisés pour vacciner dans les cabinets, les officines ou au domicile des patients.

Pour accompagner l’extension du périmètre de vaccination, l’Agence associe les compétences de ses pharmaciens et de ses contrôleurs de gestion pour établir, en lien avec les pharmaciens des hôpitaux de la région, un dispositif de gestion des stocks de vaccins. Le principe : à partir des stocks de vaccin attribués au niveau national et ajustés en temps réel, il s’agit d’apporter une visibilité de 5 à 8 semaines dans la programmation des doses, de les répartir équitablement sur les territoires et de la façon la plus efficiente.

"Une erreur de notre part, c'est une rupture dans un centre de vaccination"
Elodie Guilbault, chargée de mission efficience des établissements de santé

Un travail de minutie mené à un rythme effréné, qui s’accomplit en tenant compte de paramètres ultra-évolutifs (taux d’extraction des doses, conditions d’utilisation et délais d’administration des vaccins, etc.) au gré des connaissances progressivement acquises sur les caractéristiques des vaccins.

Surmonter la 3ème vague

Alors que la campagne de vaccination s’intensifie, la région, déjà marquée par les deux précédentes vagues de l’épidémie, est confrontée à la fin de l’hiver à une troisième vague épidémique d’une magnitude inédite, dans un contexte où l’apparition des variants perturbe la prédictabilité des flux de patients.

Les capacités de soins critiques, maintenus à 120% du capacitaire d’avant crise à la mi-décembre pour anticiper tout risque de rebond épidémique, sont régulièrement renforcées à mesure que la pression hospitalière augmente. De 600 lits en fin d’année 2020, les établissements de la région armeront jusqu’à 1000 lits de soins critiques, pour prendre en charge jusqu’à 903 patients au pic de l’épidémie début avril.

Pour rester en permanence en dessous du seuil critique de saturation, l’Agence maintient avec les établissements de santé un pilotage dynamique des capacités d’accueil en réanimation :  enquêtes quotidiennes et suivi en temps réel de l’évolution des hospitalisations, échanges plusieurs fois par semaine avec les chefs de service de réanimation et adaptation permanente des capacités de soins critiques, notamment via la création d’unités de soins intensifs (USI) Covid permettant de prendre en charge les patients un peu moins sévères.

Après avoir monté en 2020 des cellules départementales RH pour apporter des réponses sur-mesure à des établissements sanitaires et médico-sociaux parfois confrontés à des besoins spécifiques ou massifs de renfort, l'Agence poursuit son action en 2021 pour venir renforcer des équipes sous tension. Elle s'associe ainsi à Pôle Emploi afin d’aider les structures à recruter le personnel dont elles ont besoin et à anticiper les recrutements à venir tandis que la plateforme nationale "renforts RH" est activée, en substitution de la solution digitale MedGO déployée par l'Agence en 2020 et qui avait permis d'organiser 1400 missions de renfort dans la région.

"Si nous avons pu avoir 1000 lits sans déprogrammer de façon massive, c'est grâce au dialogue entre établissements et à la répartition des charges entre eux"
Benoit Vallet, directeur général de l'ARS Hauts-de-France

Un pont aérien sanitaire

Parallèlement, la solidarité inter-hospitalière joue à plein. Dans le Dunkerquois, confronté en février à une flambée épidémique et à une circulation très active du variant alors dit « britannique », les établissements peuvent compter sur l’appui de leurs homologues de la région, avec plus d’une centaine de transferts organisés pour éviter le point de rupture en réanimation.

Dans la même optique, l’Agence coordonne, à l’interface du ministère et des territoires, 59 évacuations sanitaires à partir de mars vers la Belgique puis d’autres régions françaises, au premier rang desquelles la Bretagne. L’objectif : prévenir tout risque de saturation des services de réanimation, alors que leur taux d’occupation avoisine parfois les 90%. Ces opérations, menées à chaque fois dans des conditions de sécurité drastiques et sur décision des professionnels de santé en charge du transfert, permettent ainsi de disposer de l’équivalent de deux gros services de réanimation en dehors de nos frontières régionales lors de la troisième vague, en plus du doublement de nos capacités de soins critiques.

Tester, alerter, protéger

Pour contenir autant que possible la circulation du virus et permettre au système de santé de tenir le choc alors que la couverture vaccinale s’étend progressivement, l’Agence se mobilise et adapte comme depuis février 2020 ses stratégies de dépistage, de contact tracing et de prévention aux caractéristiques de l’épidémie.

Du 11 janvier au 16 janvier, l’ARS organise ainsi « Roubaix sans Covid » une campagne de dépistage à grande échelle dans la ville de Roubaix, pour identifier une éventuelle reprise épidémique liée aux fêtes de fin d’année. Elle inaugure à cette occasion un modèle d’intervention «  tout inclus » : des équipes projetées sur différents points de la ville, au plus près des habitants, y proposent des tests antigéniques et PCR, un « contact tracing » flash et des actions de prévention sur la Covid-19.

Un modèle qui préfigure le dispositif national des médiateurs lutte anti-Covid (LAC) dont l’Agence s’empare dès le mois de février. Le principe : une quinzaine d’équipes mobiles capables de tester les habitants, de délivrer des messages de prévention et d’effectuer in situ le contact tracing, sont mobilisables en permanence aux quatre coins de la région, au plus près des lieux de vie, de travail et d’étude. Au total, près de 600 opérations des médiateurs LAC ont ainsi été menées à fin juin pour casser au plus vite les chaines de contamination.

"La stratégie "tester, alerter, protéger" a évolué tout au long de la crise"
Tiphaine Loreille, sous-directrice veille et sécurité sanitaire

Une capacité à intervenir vite et fort démontrée quand, face à la flambée des taux d’incidence dans certains territoires – Littoral Nord, Ouest de la Somme, Pas-de-Calais, Amiens Nord, etc. – l’Agence et les acteurs du territoire organisent en un temps record des opérations de dépistage de grande envergure et renforcent localement la vaccination, via notamment des opérations mobiles ou la création de centres éphémères.

Parallèlement, l’Agence travaille étroitement avec les laboratoires pour développer les capacités de criblage et de séquençage face à l’émergence des variants, et pour renforcer les capacités de test – jusqu’à 350 000 personnes sont dépistées par semaine en mars – faisant ainsi des Hauts-de-France l’une des régions leaders en matière de tests Covid.

Enfin, le contact tracing, métier historique de l’Agence, ne cesse d’évoluer pour s’adapter aux différentes séquences de crise. Expertise traditionnellement détenue par les médecins et infirmiers de veille sanitaire de l’Agence, la pratique du contact tracing embarque désormais à l’ARS une centaine de personnes mobilisées 7 jours 7 pour identifier et juguler les clusters dans la région. L’Agence met au point un système de développement et de mise à jour des connaissances : points méthodologiques hebdomadaires sous l’égide des médecins de veille, points bimensuels avec les homologues de l’Assurance maladie, lettre d’information interne… L’objectif : rester toujours au fait d’une actualité et de doctrines ultra-évolutives et échanger sur les meilleures pratiques.

 

Un marathon de la vaccination

Dans la région comme dans le reste de la France, l’arrivée du printemps est synonyme d’une forte accélération de la vaccination, sous l’effet conjugué d’une disponibilité croissante des doses, d’un maillage toujours plus dense de centres de vaccination – jusqu’à 160 centres actifs – et d’opérations extrêmement mobilisatrices le week-end et sur les ponts printaniers – plus de 350 000 habitants de la région se font ainsi vacciner pendant la semaine de l’Ascension-.

"Le moment le plus fort, c'est de voir les gens dans les centres de vaccination. C'est la concrétisation de notre travail quotidien"
Reynald Lemahieu, directeur départemental du Pas-de-Calais

673 000 injections en mars, 908 000 en avril. En mai, avec près d’1,4 million d'injections – l’équivalent de la population du Pas-de-Calais-, le nombre d’injections est littéralement décuplé par rapport à janvier. Certaines fins de semaine prennent des allures de grande fête citoyenne, où les habitants se pressent dans les espaces communaux ou les salles de spectacle pour se faire vacciner, du soulagement dans la voix ou le sentiment du devoir accompli.

Avec un quart des injections totales en mars, les professionnels libéraux des Hauts-de-France sont, dès le lancement de la vaccination en ville, parmi les plus mobilisés du pays et participent pleinement à la dynamique d’extension de la vaccination. A la fin juillet, près d'un million d'injections ont ainsi été effectuées dans un cabinet, une officine de la région ou au domicile des patients par des professionnels libéraux par ailleurs fortement investis dans l'activité des centres de vaccination.

L’Agence, qui intervient à toutes les étapes et dans toutes les dimensions de la campagne de vaccination – gestion des approvisionnements, autorisation et régulation des centres de vaccination avec les préfectures, appui technique, logistique, financier et RH aux centres, campagnes de communication, etc. – a depuis ses débuts structuré la stratégie vaccinale autour de principes forts :

La proximité, d’abord. Avec l’un des maillages territoriaux les plus denses du pays, et deux tiers de centres de vaccination installés dans des communes de moins de 25 000 habitants,  l’objectif est que chaque habitant  soit à moins de 30 minutes en voiture d’un centre de vaccination. Pour renforcer cette proximité, des équipes mobiles  vont à la rencontre des plus précaires, des habitants moins mobiles ou en zone rurale, avec en particulier des cars qui sillonnent la région et font étape sur les places de village  ou dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

L’équité territoriale, également. Tout au long de la campagne, l’Agence répartit les doses disponibles selon un principe d’équité territoriale et selon les capacités de vaccination des centres. Cette répartition s’effectue à la plus fine maille possible, proportionnellement à la population générale de chaque arrondissement, et l’Agence procède à des ajustements quand des écarts sont relevés dans le rythme de vaccination entre les territoires.

Une vaccination 7 jours sur 7.  Avec les centres de vaccination, réunis plusieurs fois par mois en webinaire, l’Agence s’attelle à optimiser l’amplitude d’ouverture et à étendre le nombre de créneaux de vaccination – en soirée, le week-end, les jours fériés, sans rendez-vous – pour faciliter l’accès de la vaccination à tous, à mesure notamment que celle-ci s’ouvre aux populations actives.

La mobilisation continue

Fin juillet, plus de 3,5 millions d’habitants de la région ont reçu une dose et 3 millions d’entre eux sont complètement vaccinés - 60% de la population éligible des Hauts-de-France - . Ce résultat, fruit d’une extraordinaire mobilisation collective des acteurs de santé et du médico-social, des sapeurs-pompiers, services de l’Etat, collectivités, élus, bénévoles, associations, etc., est considérable.

"La vaccination est un gigantesque fédérateur des énergies du système de santé"
Benoit Vallet, directeur général de l'ARS Hauts-de-France

Mais aussi important soit-il, il n’est pas encore suffisant pour atteindre l’immunité collective, a fortiori dans un contexte de propagation du variant delta qui menace nos efforts collectifs.

A l’heure des traditionnels congés annuels, l’Agence et les acteurs de la vaccination redoublent donc d’efforts et de créativité pour vacciner massivement pendant l’été : capacités de vaccination portées à leur maximum, mise à disposition dès mi-juillet des flacons Pfizer auprès des professionnels libéraux depuis les centres de vaccination, mobilisation de tous les professionnels volontaires et des étudiants en santé, multiplication des opérations « d’aller vers » et de la vaccination sans rendez-vous, sur les lieux de vacances ou au plus  près des lieux de vie, accès à la vaccination facilité à tous les professionnels concernés par la vaccination obligatoire…

La mobilisation continue, et ne faiblira pas tant que la situation sanitaire l’exigera.

Dernière modification : juillet 2021